«Nous sommes les abeilles de l’Univers. Nous butinons éperdument le miel du visible pour l’accumuler dans la grande ruche d’or de l’invisible.»
Rainer Maria Rilke est né à Prague le 04 décembre 1875 et est décédé à Montreux (Suisse) le 29 décembre 1926.
Si j'ouvre ce topic en son honneur, c'est qu'il est mon presque voisin, tant il est vrai qu'il vécut longtemps près de Sierre, dans une tour que lui acheta un mécène.
Il est inhumé en Valais et sur sa tombe, il y a des rosiers en permanence, pour donner raison à l'épitaphe en allemand Rose,o reiner Widerspruch, Lust niemandes Schlaf zu sein unter so viel Lidern. qui peut se traduire par :
«Rose, ô pure contradiction, volupté de n'être le sommeil de personne, sous tant de paupières»
J'apprécie aussi cet auteur pour la profonde humanité qui transparaît dans ses oeuvres, pour son courage et sa grande culture. Il n' y a pas beaucoup d'écrivains capables d'être aussi génial en allemand et en français.
Voici des poèmes tirés des Quatrains valaisans .
Mis en musique par Darius Milhaud entre 1939 et 1943, ces cinq quatrains valaisans de R. M. Rilke évoquent son attrait pour cette région de la Suisse en 1924
Et puis .... j'ai eu le plaisir de les chanter avec le choeur de mon village.
Pays, arrêté à mi-chemin
Pays, arrêté à mi-chemin
Entre la terre et les cieux
Aux voies d'eau et d'airain,
Doux et dur, jeune et vieux,
Comme une offrande levée,
Vers d'accueillantes mains
Beau pays achevé,
Chaud comme le pain !
Rose de Lumière
Rose de lumière, un mur qui s'effrite,
Mais sur la pente de la colline
Cette fêlure qui, haute, hésite
Dans son geste de Proserpine.
Beaucoup d'ombre entre sans doute
Dans la sève de cette vigne.
Et ce trop de clarté qui trépigne
Au-dessus d'elle, trompe la route.
L'année tourne autour du pivot
L'année tourne autour du pivot
De la constance paysanne
La vierge et Sainte Anne
Disent chacune leur mot.
D'autres paroles s'ajoutent
Plus anciennes encore
Elles bénissent toutes
Et de la terre sort
Cette verdure soumise
Qui par un long effort
Donne la grappe prise
Entre nous et les morts.
Chemins qui ne mènent nulle part
Chemins qui ne mènent nulle part
Entre deux prés,
Chemins que l'on dirait avec art
De leur but détourné,
Chemins qui souvent n'ont
Devant eux rien d'autre en face,
Que le pur espace
Et la saison.
Beau papillon
Beau papillon près du sol
A l'attentive nature
Montrant les enluminures
De son livre de vol.
Un autre se ferme au bord
De la fleur qu'on respire !
Ce n'est pas le moment de lire
Et tant d'autres encor
De menus bleus, s'éparpillent
Flottants et voletants,
Comme de bleues brindilles
D'une lettre d'amour au vent
D'une lettre déchirée
Qu'on était en train de faire
Pendant que la destinataire
Hésitait à l'entrée.